Récent.e.s lauréat.e.s
Le prix Wallace-K.-Ferguson
Bryan D. Palmer. James P. Cannon and the Origins of the American Revolutionary Left, 1890-1928, Urbana, University of Illinois Press, 2007.
Bryan D. Palmer revisite les origines de la gauche révolutionnaire aux États-Unis par le biais de l’expérience de James P. Cannon, un natif du Kansas ayant milité avec les socialistes et les wobblies avant son engagement communiste à l’aube des années 1920. Pour ce membre fondateur du Parti des travailleurs (1921) que Palmer présente dans sa complexité et ses nuances, le syndicalisme et le communisme prennent leur sens dans les solidarités interethniques, les luttes contre les employeurs et l’État autant que dans les engagements politiques qui fractionnent les militants et leurs organisations. En situant les années 1920 au centre de son propos, Palmer fait comprendre que l’expérience des radicaux américains ne se réduit pas à porter une cause étrangère et à une période contemporaine et postérieure au Front populaire. Sous la plume de Palmer, la biographie comme échelle d’observation du sujet permet de situer le regard sur des contextes riches et des horizons larges où les réalités historiques sont finement croisées, notamment grâce à un corpus documentaire impressionnant, une exploitation judicieuse des sources et une maîtrise exemplaire d’une historiographie animée par des remous interprétatifs. Il est important que la Société historique du Canada couronne l’un de ses grands chercheurs pour une étude aussi forte et originale à une époque où le dialogue sur le sens de l’engagement révolutionnaire est atrophié par l’opportunisme politique et la myopie des lignes de parti. Nous attendons avec impatience la sortie du second volume de cette biographie
Mentions honorables
Donald Harman Akenson, Some Family: the Mormons and How Humanity Keeps Track of Itself, Montreal-Kingston, McGill-Queen’s University Press, 2007.
Some Family est présenté comme une histoire de la généalogie au sein de l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours (Mormons). L’ouvrage reflète certainement cette proposition : une histoire examinant la façon par laquelle les Mormons en sont venus à voir la généalogie tel un outil de leur mission rédemptrice et à adopter certains principes généalogiques pour ériger et transmettre leur vision de l’histoire humaine. La reconstruction de cette histoire par Akenson est renforcée par une lecture fine et impressionnante des sources mormones que les chercheurs ont jusqu’ici complètement ignorées. L’étude traite toutefois bien plus que de généalogie ch2009-06-13ration bien documentée et vivement intelligente des motivations et méthodes à travers lesquelles les sociétés du monde ont tenté de tracer les liens de famille et de parenté dans le passé. La conclusion la plus frappante d’Akenson concerne le fait que tous les projets de généalogie sont assurés de générer des erreurs historiques. Vue par le passé telle une des démarches les plus simples du travail en histoire, la généalogie est maintenant considérée B en partie grâce à cette étude remarquable B comme l’approche la moins susceptible de produire le fait historique. Ce livre inoubliable offrant de savoureux plaisirs de lecture mène le lecteur sans peine dans des dédales méthodologiques qui, dans les mains de n’importe quel autre spécialiste, intimiderait les passionnés d’histoire les plus convaincus.
Laurent Turcot. Le promeneur à Paris au XVIIIe siècle. Paris, Gallimard, 2007.
Se promener est une activité qui semble aller de soit. Pourtant, cette action a elle aussi une histoire que nous raconte, dans ce livre passionnant qui a Paris pour cadre, Laurent Turcot. Le promeneur et les rituels de la promenade se développent au XVIIIe siècle dans une relation à la fois individuelle et collective avec la ville et ses habitants. Le promeneur est à la fois le produit de l’espace qui l’entoure et une des composantes qui le façonne. Turcot analyse l’élaboration de ces liens comme pratiques sociale, hygiénique ou politique à partir de sources riches et variées, tant imprimées que manuscrites. Le livre, abondamment illustrée, met en scène toutes les composantes de la vie parisienne du XVIIIe siècle : la princesse y côtoie la prostituée, les repris de justice les agents de police, alors que l’auteur nous amène avec lui dans les différentes sortes de promenade qui existe alors : de civilité, de santé, de divertissement, diurne ou nocturne. Livre d’histoire urbaine, qui peut aborder l’apparition des grands boulevards urbains, autant que livre d’histoire sociale ou culturelle, Le promeneur à Paris au XVIIIe siècle nous invite à parcourir l’espace parisien tel qu’il se construit durant la deuxième moitié du XVIIIe siècle, mais aussi à réfléchir sur nos propres pratiques de promenade par lesquelles nous définissons l’espace que nous vivons.