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Faire connaître votre travail

Faire connaître votre travail

Revu et augmenté par Jenny Ellison, PhD, conservatrice de la section « sports et loisirs » au Musée canadien de l’Histoire

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Les historiens ont un certain nombre de possibilités de faire connaître leur travail, allant des publications à évaluation par les pairs aux entrevues dans les médias en passant par les blogues. Chaque média s’adressant à un public différent, vous pouvez adapter votre message à celui-ci. Il est important pour votre carrière, quelle que soit celle-ci à l’avenir, que vous fassiez connaître votre recherche. Cette forme de communication, savante ou de vulgarisation, aura un impact sur la façon dont les gens à qui vous vous adressez comprendront le passé. Ce chapitre présente les différents médiums consacrés au partage des recherches historiques et la façon d’y diffuser votre travail.

1- Conseils incontournables et impérissables

Quelle que soit la façon dont vous ferez connaître votre travail, ne vous écartez pas de ces règles de base :

–       Conservez toujours un ton aimable. La collégialité est fondamentale dans toutes les interactions académiques. Même lorsque dans votre travail vous critiquez les travaux des autres, restez très conscient du ton que vous adopterez. Hissez-vous sur les épaules d’autres chercheurs plutôt que d’essayer de les faire tomber de leur piédestal. Même les formes d’interactions apparemment éphémères comme les médias sociaux devraient être abordées avec précaution. Prenez garde au faux-pas qui pourrait affecter votre carrière : ne dites et ne partagez que ce que dont vous seriez prêt à répondre dans un contexte plus formel.

–       Mieux vaut la qualité que la quantité. Si vous recherchez un emploi menant à la titularisation, le terme « qualité » signifie encore et toujours la publication de travaux évalués par les pairs dans des revues et ouvrages savants. Mais même en dehors de ce type de publications, la qualité demeure essentielle. De bons travaux de recherche bien rédigés sur des blogues populaires tels que ActiveHistory.ca, HistoireEngagée.ca, ou The Conversation peuvent représenter une belle carte de visite pour des historiens. Ils montrent votre profondeur de vues en tant que chercheur en même temps que votre aptitude à vous adresser à différents publics.

–       Attendez-vous à devoir vous corriger. Lorsque vous soumettez votre travail à une revue ou une publication, n’espérez pas qu’il sera accepté sans que l’on vous demande de le réviser. Que vous travailliez avec un rédacteur professionnel ou un évaluateur, vous pouvez vous attendre à ce qu’ils vous fassent des remarques. Si votre projet de publication s’adresse au grand public, attendez-vous à devoir lier votre recherche à des problèmes contemporains. Si vous soumettez un travail à un évaluateur anonyme, gardez à l’esprit qu’il verra probablement votre article d’un autre œil que votre directeur de recherche. L’évaluation par les pairs est parfois un processus difficile (voire « répugnant », diront certains). Soyez ouvert aux remarques constructives. Si quelqu’un se montre mesquin ou cruel, recherchez l’appui de votre communauté universitaire.

–       N’ayez pas peur de dire non. Pour les étudiants diplômés, les opinions divergent quant à la quantité de travaux de recherche qu’il leur faudrait publier et quant au moment de le faire. Discutez avec vos professeurs pour savoir si vous devriez faire connaître votre travail et demandez-leur leur avis sur les revues ou publications qui vous conviendraient le mieux. Il est rare que des conférences ou des opportunités de publication ne se présentent qu’une seule fois. Si votre travail n’est pas prêt, si vous avez déjà trop d’engagements ou si votre santé mentale doit en souffrir, remettez à plus tard la publication de cet article, de ce blogue, de ce « balado » (podcast).

2- Où faire connaître votre travail

La plupart des choses qui relèvent du monde savant font l’objet de sains débats, et il en existe un en ce moment au sujet des « lieux » de publication qui devraient retenir l’attention des chercheurs. Ceux qui cherchent à pratiquer leur art dans le secteur des musées (des beaux-arts et autres), dans les bibliothèques et archives, dans les ministères ou gouvernements provinciaux, ou en tant que consultants peuvent souhaiter concentrer leurs efforts sur les magazines spécialisés ou les conférences et revues dédiées à ces secteurs en particulier. Et dans ces secteurs, les travaux non évalués par les pairs peuvent compter autant (sinon plus) que les publications avec évaluation par les pairs. Savoir communiquer avec concision et élégance peut y avoir davantage de poids que la capacité d’effectuer des analyses complexes d’ouvrages savants. Mais si votre objectif est le travail universitaire, la plupart des gens s’accorderont à dire que vous devriez vous concentrer sur les articles ou chapitres de livres soumis à l’évaluation par les pairs.

La plupart du temps, on s’attend à ce que la plupart des intellectuels ayant une dimension publique, quel que soit le lieu où ils travaillent, publient des éditoriaux dans les journaux, répondent à des interviews dans les médias, rédigent des blogues et soient présents sur les réseaux sociaux. La tendance est de plus en plus à la reconnaissance du fait que les travaux non évalués par les pairs devraient néanmoins être pris en compte dans les processus d’embauche et de titularisation. Dans chaque université, les ententes sont différentes, certaines institutions considérant les engagements publics comme faisant partie du travail, d’autres non. En comparaison, l’engagement auprès du public a un grand poids dans les musées et dans le travail d’historien dans les institutions publiques. Ce débat ne pourra pas être résolu dans ce guide de carrière, mais il peut servir à rappeler au lecteur qu’il doit bien réfléchir à la façon de diffuser ses travaux.

Si votre objectif de carrière est bien clair dans votre esprit, renseignez-vous sur les qualifications exigées pour ce travail et sur le type d’écrits que l’on s’attend à vous voir produire. Si vous n’êtes pas sûr de la façon de franchir les prochaines étapes, vous devriez envisager la possibilité de diffuser vos travaux dans divers types de publications.

3- Les médias sociaux

Une présence sur les médias sociaux peut vous aider à élargir votre audience et à donner plus d’impact à votre travail, en plus de vous créer un réseau professionnel. Si vous savez les utiliser, les médias sociaux pourront rehausser votre profil ; mais gardez bien à l’esprit qu’il s’agit d’espaces publics. Réfléchissez bien à ce que vous partagez ainsi qu’à la façon dont cela pourrait affecter votre santé mentale et votre réputation professionnelle. Cela n’a rien de contraignant. Pensez simplement à votre identité numérique et à la façon dont vous voulez prendre part à la conversation en ligne. À vous de décider si vous préférez associer votre voix sur les réseaux sociaux à votre présence professionnelle. Certaines personnes pensent qu’il est préférable de garder ces deux mondes bien séparés. Une fois que vous aurez réfléchi à votre identité en ligne, consultez le site www.jobs.ac.uk (et son « bulletin de santé d’identité numérique »[1]) pour identifier les outils numériques dont vous disposez pour votre carrière. Il vous aidera à optimiser votre présence en ligne ce qui, en retour, vous aidera à faire connaître vos travaux et à élargir votre réseau professionnel.

4- Les conférences

C’est dans le cadre des conférences que vous pourrez apprendre, vous constituer un réseau et faire connaître votre travail. Elles sont essentielles en ce qu’elles vous permettent d’explorer vos objectifs et vos opportunités professionnelles. Elles peuvent vous servir à exposer vos travaux et à solliciter des remarques sur vos projets en cours. Évitez de créer un nouveau projet spécialement pour une conférence. Les communications prennent beaucoup de temps et, dans l’idéal, elles devraient être en relation symbiotique avec votre recherche et votre travail.

Dans la mesure du possible, assistez à quelques conférences avant de prononcer votre première communication. Choisissez bien celles auxquelles vous assisterez, peut-être en suivant l’avis d’un mentor pour savoir quels sont les évènements les plus collégiaux et les plus productifs. Les conférences peuvent s’avérer intimidantes, surtout lorsque les chercheurs confirmés ont l’air détendus et à l’aise dans leur milieu alors que vous n’avez personne à qui parler. Si vous apercevez votre chercheur préféré dans la file d’attente du dîner, allez vous présenter ! Ne vous sentez pas obligé de lui parler de son travail. Posez-lui simplement des questions sur l’évènement (La conférence vous plaît-elle ? Avez-vous assisté à des tables rondes intéressantes aujourd’hui ?) ou faites une remarque sur ce qui vous a plu (« J’ai vraiment apprécié le discours inaugural parce que… »). De nombreuses conférences proposent une aide financière aux étudiants diplômés, sous la forme de tarifs d’admission réduits ou de bourses de voyage. Certaines vous font grâce des frais d’inscription contre du bénévolat au bureau d’accueil. Renseignez-vous sur leur site Internet pour en savoir davantage sur ces possibilités. Il est possible que votre département ou votre université puisse vous accorder une bourse de voyage couvrant vos frais d’inscription, de voyage et d’hébergement. Dans les deux cas, les fonds pourraient être réservés aux personnes qui présentent des communications. N’hésitez pas à vous renseigner sur la possibilité de vous faire octroyer de telles aides. Il est possible que vous deviez présenter votre demande plusieurs mois avant la conférence.

N’hésitez pas non plus à tirer parti des évènements réservés aux étudiants des deuxième et troisième cycles lors de ces conférences. Ces étudiants seront plus tard vos pairs et vos collaborateurs, et ces évènements constituent une formidable occasion d’en savoir davantage sur ce que vivent les historiens en formation dans les autres universités. Pensez aussi à assister aux comités ou aux évènements sociaux organisés par les groupes de votre association universitaire, comme le groupe d’histoire publique de la SHC. Vous y rencontrerez des historiens confirmés, qui s’intéressent aux mêmes choses que vous, et il pourrait se présenter des occasions de collaborer avec eux. Mais en plus de ces occasions de socialisation que procurent les conférences, il reste quelques éléments pratiques à considérer.

1. Intégrer le programme

Les conférences sont annoncées dans des « appels à communication » affichés en ligne. Consultez notre section « Ressources générales » pour savoir où trouver ces informations. En général, les comités organisateurs des conférences cherchent à élaborer un programme équilibré sur les plans géographique, chronologique et thématique, et à inclure des participants d’origines diverses qui en sont à différentes étapes de leur carrière ; mais un colloque dont la thématique est très précise peut être plus restrictif quant à la sélection des participants. La plupart des conférences, y compris celles des réunions annuelles ou régulières des grandes associations, ont quelques thèmes de prédilection qui vont guider les choix de leur comité organisateur, bien que de nombreuses propositions de communications sur des thématiques différentes puissent aussi faire partie de la sélection finale.

Une session de conférence comprend habituellement deux ou trois personnes présentant une communication, un président de séance et un commentateur chargé d’esquisser quelques liens entre les communications et d’adresser quelques remarques brèves mais constructives à chacun des présentateurs. Les séances thématiques sont souvent proposées à l’avance par un groupe d’universitaires. Après l’affichage en ligne d’un appel à communications, il arrive souvent que l’on recherche des présentateurs par l’intermédiaire des réseaux sociaux. Vous pouvez vous-même initier une séance thématique en contactant des spécialistes de votre domaine, mais vous n’avez pas à la proposer en tant que telle. Bien que certaines conférences aient une préférence marquée pour les séances déjà pleinement constituées, il est également tout à fait acceptable de proposer une communication à titre individuel.

Si vous organisez une séance, souvenez-vous que chacune des communications individuelles doit clairement avoir un lien avec les autres et porter sur un problème ou un sujet significatif sur le plan historique. Évitez les sessions aux thématiques trop étroites : seuls quelques rares spécialistes seront désireux d’entendre deux communications sur le même sujet. Pensez « large » et pensez « histoire comparée ». Faites en sorte que votre séance rassemble deux ou trois communications sur le même thème, mais traité de façon différente, ou qu’elle porte sur différentes époques, différents groupes, différentes approches.

En règle générale, une proposition consiste en un bref sommaire ou « résumé » de chacune des communications proposées (qui tient en un paragraphe), un CV d’une page pour chacun des participants et une courte explication de l’objectif et de la signification de la séance. L’une des personnes participant à la séance agit en tant que coordinatrice auprès de tous les participants pour réunir les documents requis et les soumettre aux organisateurs de la conférence avant la date limite.

2. Prononcer une communication

Lors de la conférence, chacun des présentateurs dispose de dix à trente minutes pour évoquer ses recherches. Les conférences proposent également des sessions ou tables rondes portant sur un sujet particulier ou une controverse. En général, ces dernières incluent davantage de participants, chacun s’exprimant brièvement sur ce dont il est question au lieu de prononcer une communication formelle. Quel que soit le type de séance, assurez-vous de bien suivre les instructions et de ne pas dépasser le temps qui vous est imparti. Certains présidents et organisateurs de séances demandent à lire les communications à l’avance (en particulier s’il y a un commentateur). Si le groupe avec qui vous proposez une séance est d’accord, envoyez votre travail final à temps – mais ne commettez pas l’erreur d’envoyer un article de 35 pages à un commentateur qui s’attend à recevoir une communication de 10 à 12 pages.

Beaucoup de conférenciers confirmés s’amusent à dire qu’ils rédigent leur communication dans l’avion. Mais si vous êtes nouveau dans la profession, prenez soin de terminer votre communication bien avant la conférence. Entraînez-vous à la lire à l’avance, sachant que cela prendra plus de temps devant un public. Faites en sorte que votre communication soit assez courte pour ne pas dépasser le temps imparti. Les présidents de séance ont pour fonction d’interrompre les présentations au terme de la durée allouée. Vous ne voudriez pas que l’on vous fasse rassoir juste avant d’atteindre le point d’orgue de votre éloquence ; et il n’est pas bon non plus de prononcer à toute vitesse une communication dont vous savez qu’elle est trop longue. Votre public ne vous suivrait pas. Employez un langage plus simple que celui que vous utiliseriez pour un article destiné à la publication ; votre argument sera plus facile à suivre si vous faites des phrases relativement courtes, sans trop de subordonnées. Ne cédez pas à la tentation d’en dire trop. Ne mentionnez pas trop de détails, de chiffres ou de justifications. Lors des conférences, les meilleures communications sont informelles. Elles se font sur le ton de la conversation, le conférencier se concentrant sur le cœur de son propos et sa signification pour le public.

Si, pour votre présentation, un microphone est fourni, servez-vous-en toujours. Toujours. Si l’on fournit des micros, c’est à des fins d’accessibilité. Il est inacceptable de se contenter de parler plus fort ou de demander si quelqu’un a besoin du microphone. Cela obligerait certaines personnes à dévoiler des particularités d’audition dont elles n’ont pas forcément envie de parler. Servez-vous du micro !

Il existe un certain nombre de ressources en ligne pour vous aider à créer de belles présentations visuelles à l’appui de votre travail. Vous devriez également consulter des guides à cet effet, pour vous aider à rendre votre présentation accessible visuellement et intellectuellement à tous les membres du public. Mais ne laissez pas ces ressources techniques empiéter sur votre travail, et arrivez à l’avance à votre session pour tester votre présentation et les multiples formats qu’elle implique.

Tout comme un cours, présenter une communication à une conférence est aussi une « représentation ». La qualité de votre travail est ce qui importe le plus, mais le public jaugera aussi la façon dont vous le présentez. En prononçant votre communication, pensez à regarder le public ! Prévoyez une tenue vestimentaire dans laquelle vous vous sentez à l’aise et professionnel. Si vous en avez la possibilité, répétez votre présentation devant des collègues et des mentors.

Même en l’ayant soigneusement préparée, certains aspects de votre communication à la conférence resteront incontrôlables. Par exemple, il se peut que la session où vous intervenez ait été programmée au tout début de la journée et que peu de gens y assistent ; ou bien que l’un des auditeurs s’intéresse davantage à faire part de ses propres pensées qu’à votre travail. Mais quoi qu’il arrive, faites de votre mieux pour susciter l’intérêt du public et des autres conférenciers de votre session.

5 – Les publications savantes

Les livres et les articles soumis à l’évaluation par les pairs conservent encore le plus grand poids dans les CEGEPS et les universités. Les historiens débutants qui visent une carrière universitaire doivent s’efforcer de faire paraître leurs travaux dans ces types de publications.

Si vous avez une prédilection pour une certaine revue, ou si rêvez d’un éditeur en particulier, consultez en premier lieu leurs instructions aux auteurs. De cette façon, vous pourrez tailler votre travail sur mesure et choisir que publier. Une fois que certains de vos travaux auront été publiés, inscrivez-vous sur les sites access©[2] et DPP, du Conseil des Arts du Canada[3], afin d’être sûr de recevoir des droits d’auteur pour les reproductions de vos travaux. Il ne s’agit pas de sommes considérables, mais cela représente tout de même une modeste rétribution pour votre travail.

Attention : méfiez-vous des prédateurs qui vont se précipiter pour publier votre travail ou vous demander de l’argent pour vous publier ; il peut s’agir d’arnaques à l’édition, ou de revues qui publient sans révision ni évaluation.

a. Les comptes rendus d’ouvrages

Les comptes rendus de livres sont un bon point de départ pour les publications savantes – ils constituent un moyen d’aiguiser vos capacités critiques, de vous engager dans votre domaine et d’apprendre à polir votre écriture. Il n’est pas nécessaire d’attendre que l’on vous demande de rédiger un compte rendu. Faites savoir aux rédacteurs des comptes rendus des diverses revues que vous êtes intéressé à contribuer, en règle générale ou pour un titre en particulier. La façon de procéder varie d’une revue à l’autre. Certaines vous demanderont de vous inscrire sur la liste des auteurs de comptes rendus, ou vous demanderont d’ajouter votre nom à une base de données. D’autres sont moins formelles, affichant simplement la liste des livres disponibles pour comptes rendus pour lesquels vous pouvez vous porter volontaire. Sélectionnez un ouvrage qui se rapproche de votre domaine, et évitez de rédiger des comptes rendus de travaux publiés par vos amis ou vos professeurs. Pour un auteur, le compte rendu représente une étape importante de ses travaux et ce que vous en direz aura un impact sur la façon dont les autres historiens considéreront ses recherches. Quel que soit le livre sur lequel se portera votre choix, il est d’une importance cruciale que votre analyse du texte soit juste et honnête, et que vous évitiez autant d’en faire le panégyrique que de lui adresser une critique indue.

b.  Articles dans des revues et chapitres de livres

Les chercheurs souhaitant faire carrière à l’université devraient s’efforcer de publier un ou deux articles évalués par les pairs au cours de leur doctorat. Les revues diffèrent sur le plan du prestige, de l’orientation et de la thématique. Savoir lesquelles sont les meilleures, cela fait toujours l’objet d’un débat. Certains départements et comités d’embauche (surtout en sciences et sciences sociales), notent les revues et, par convention, utilisent ce classement pour évaluer les candidatures et les demandes de titularisation. Dans d’autres contextes, le prestige d’une revue agit de façon informelle sur les examinateurs, souvent en fonction de leurs inclinations idéologiques et méthodologiques. Le texte « Unwritten Histories », d’Andrea Eidinger[4], qui présente une utile description des revues publiant les travaux d’historiens canadiens, peut vous donner une bonne idée de leurs différentes approches. Actuellement, de nouvelles priorités, telles que l’accès libre en ligne, ainsi que les critiques portant sur les préjugés des évaluateurs et le fait que leur travail soit non rémunéré, sont en train de transformer le paysage des publications savantes. Aux États-Unis, les universités ont fortement tendance à classer les revues en fonction de « l’indice h ».

Une autre façon de publier un article est de participer à un ouvrage dirigé. Les appels à contribution sont en général affichés en ligne sur le site H-Net et d’autres réseaux d’informations universitaires. Les universitaires qui dirigent ces ouvrages rassemblent en général des chercheurs aux niveaux d’expérience variables autour d’un thème commun. Le processus d’évaluation et de révision de ces chapitres est semblable à ceux des articles de revues. La valeur comparée d’un chapitre de livre ou d’un article de revue reste à débattre. Il est un peu plus facile d’accéder aux articles de revues en ligne grâce aux bases de données, et par conséquent, ceux-ci peuvent avoir une plus large audience. Cependant, un ouvrage dirigé, lorsqu’il est de haute tenue, peut finir par être intégré à des cours universitaires. Avant d’écrire un article, pensez au type de public savant que vous souhaiteriez toucher, et au type de revue qui vous aidera le mieux à établir votre profil de chercheur.

i) Soumission

Les revues et les personnes dirigeant un ouvrage vous procureront les instructions quant à la longueur de votre article ou de votre chapitre et au style de citation qu’ils préfèrent. Suivez ces instructions et modifiez vos citations en fonction du format prescrit avant de soumettre votre travail. Si un rédacteur préfère le « style APA », il ne sera pas franchement enthousiasmé de recevoir un article suivant le « style Chicago ». Comme de toute façon vous devrez finir par adapter votre travail aux spécifications de la publication, autant le faire dès le début.

Le public d’un article de revue ou d’un chapitre de livre est en général constitué d’autres universitaires ainsi que d’étudiants de tous les cycles. L’objectif est de situer votre travail en relation avec les travaux existants, de faire connaître une recherche originale et d’apporter de nouvelles idées à la conception que les historiens se font de votre sujet. Ici encore, comme dans toutes les publications, il est crucial de ne pas déformer ou écarter d’un revers de main les travaux d’autres chercheurs.

Une écriture dépouillée de tout jargon est la meilleure façon de procéder. En règle générale, les gens ne se laissent pas impressionner par ceux qui « jouent à l’intello ».

ii) Évaluation et révision

Les articles soumis vont suivre un processus d’évaluation confidentiel en étant soumis à l’avis de deux ou trois spécialistes reconnus du domaine concerné. En règle générale, l’évaluateur n’est pas connu de l’auteur, mais le nom de l’auteur peut, ou non, être connu de l’évaluateur ; la confidentialité est maintenue afin d’encourager des évaluations honnêtes et justes et de conserver une rigueur intellectuelle. Les pairs chargés des évaluations rédigent des commentaires et recommandent ou non la publication de l’article, selon que celui-ci est prêt pour publication ou non.

Ensuite, le rédacteur en chef de la revue ou son équivalent va : a) refuser votre article dans son état actuel ; b) vous demander d’y apporter des modifications importantes et de le soumettre à nouveau pour une autre série d’évaluations ; ou c) l’accepter pour publication une fois que vous y aurez apporté certaines corrections. La plupart des publications exigent des corrections.

Il arrive que les avis des évaluateurs soient contradictoires. Si tel est le cas, vous pouvez demander au rédacteur en chef ce qu’il en pense.

En règle générale, le rejet ou les critiques sévères des évaluateurs n’ont rien de personnel et ne constituent pas non plus une jauge de votre propre valeur. Pour nous tous, les évaluations sont décevantes, quelle que soit notre ancienneté. Vous pouvez réviser votre article et le soumettre à nouveau, à la même revue ou à une autre. La critique fait partie de la vie professionnelle d’un universitaire. La section « Ressources » de ce guide propose des pistes de soutien académique et personnel dans le cadre des études supérieures.

c. Les livres

La monographie est toujours largement considérée comme le moyen le plus sûr d’obtenir avancement et titularisation. Mais toutes les disciplines ne partagent pas ce point de vue et si vous visez un emploi en sciences sociales, la norme est de publier votre thèse sous la forme d’une série d’articles. Si vous visez un poste menant à la titularisation, vous devriez pouvoir démontrer que votre thèse est en cours de publication ou préciser quels sont vos projets à ce sujet, s’ils ne sont pas déjà en cours.

Le livre représente le point culminant d’une recherche ; pour les nouveaux diplômés, il s’agit le plus souvent d’une version révisée de leur thèse. Mais généralement, même la meilleure des thèses ne sera pas immédiatement acceptable pour publication. Les règles qui régissent la production d’une thèse ne sont pas forcément celles que suivent les éditeurs d’ouvrages savants. Une thèse se concentre parfois sur un sujet étroitement délimité et prétend à l’originalité en faisant exclusivement référence aux nombreux travaux d’autres chercheurs. C’est un projet de la taille d’un livre conçu pour évaluer vos compétences en tant qu’historien, mais qui ne séduira pas forcément le grand public dont on besoin les éditeurs (qui subissent de plus en plus de contraintes financières). Les presses universitaires attendront de vous révisions et polissage. Certains auteurs effectuent quelques recherches supplémentaires pour la publication, mais cela n’est pas toujours exigé. On pourra vous demander de passer du point de vue de l’étudiant de troisième cycle désireux de prouver qu’il est digne d’attention au point de vue de « l’expert » capable de discuter avec autorité de l’historiographie de son sujet.

i) Choisir un éditeur

Prospectez les presses universitaires avant de soumettre votre livre. Au Canada, la plupart des historiens non encore titularisés travaillent avec des presses universitaires parce que leur travail y sera soumis à une évaluation par les pairs. Après leur titularisation, certains professeurs travaillent avec des maisons d’édition commerciales qui produisent des livres destinés à un plus large public.

Vous pouvez vous faire une idée de l’orientation des presses universitaires – sur le plan de leur tonalité et du type d’ouvrages qu’elles publient – en consultant leur catalogue ou en discutant avec des éditeurs lors des conférences. Demandez aux autres auteurs quels sont les avantages et les inconvénients de travailler avec telles ou telles presses universitaires.

Celles-ci font figurer leurs instructions aux auteurs sur leur site Internet. On vous demandera de rédiger une proposition démontrant les contributions essentielles de votre livre, évoquant son public et fournissant des détails précis au sujet de chaque chapitre. Normalement, c’est l’auteur qui sollicite le premier contact. Vous pouvez simplement soumettre une proposition. Cependant, si vous en avez la possibilité, présentez-vous avant de soumettre votre proposition par courriel ou par lettre. Faites savoir à l’éditeur ce sur quoi vous travaillez. Il pourrait avoir des suggestions à vous faire pour faciliter le processus de proposition. Sachez que vous pouvez envoyer une requête et une proposition à plus d’un éditeur, mais une fois que des presses universitaires auront demandé à lire votre manuscrit, ne l’envoyez à personne d’autre jusqu’à ce que vous sachiez si cette maison souhaite publier votre travail ou non.

ii) Travailler avec votre éditeur

Votre éditeur vous fournira les instructions pour adapter votre manuscrit au style de la maison. Comme pour toutes les publications, il est nécessaire de les suivre. L’éditeur des presses universitaires rédigera également un rapport à l’intention du comité de publication au sujet de la qualité et de la viabilité commerciale de votre projet. Une fois le manuscrit peaufiné, votre éditeur l’enverra à deux ou trois personnes pour une évaluation par les pairs.

À un certain point, votre éditeur vous demandera de signer un contrat – cela se passe souvent au moment où le manuscrit est accepté pour évaluation ou après que les révisions aient été effectuées et qu’il est prêt à entrer dans le processus de production. Les presses universitaires feront en toute probabilité figurer au contrat une « clause de sortie » qui est la formule qui leur permet de se retirer en cas de problèmes lors du processus d’évaluation. Les presses universitaires canadiennes n’ont pas de gros budgets, aussi dit-on généralement qu’il ne reste pas beaucoup de possibilités aux auteurs de négocier des droits d’auteurs et autres gratifications. Ceci dit, vous devriez poser des questions et vous affirmer. Demandez des détails : combien de livres seront publiés, dans quel format, à quel prix… Vous pouvez également demander à conserver les droits d’auteur sur votre travail et obtenir quelques exemplaires supplémentaires à titre d’auteur.

iii) Évaluation et corrections

La production d’un livre peut être très lente. Vous serez étonné de constater la somme de travail qu’un auteur doit fournir pour préparer son manuscrit. Certaines presses universitaires effectuent cela dans un ordre différent, mais le travail comprend :

–       l’évaluation par les pairs : on pourra vous demander d’effectuer plus d’une série de corrections, en fonction des commentaires que vous feront vos premiers lecteurs.

–       Images et tableaux : c’est probablement à vous qu’incombera la responsabilité de fournir les images et cartes numérisées en haute résolution qui devront figurer dans votre livre. On vous demandera également probablement d’obtenir les droits de reproduction de celles-ci. (Lorsqu’il s’agit de revues, la plupart ne disposent pas d’un budget pour acheter les droits de ces images ou pour qu’un membre de leur équipe le fasse pour vous.)

–       Révision éditoriale : une fois votre manuscrit accepté, votre éditeur l’enverra à un réviseur professionnel. Vous pourrez être en communication régulière avec ce dernier, et devoir répondre à ses questions au sujet de votre travail.

–       Index : les presses demandent aux auteurs de faire eux-mêmes leur index. Si vous pouvez vous procurer des fonds pour cela, elles pourront vous recommander quelqu’un dont c’est le métier. Si vous le créez vous-même, renseignez-vous sur les possibilités d’utiliser un logiciel spécialisé qui pourra vous épargner le temps et les coûts associés à cette tâche.

–       Lecture d’épreuves : le livre sera mis en page et composé, et vous en recevrez les épreuves. À ce stade, seules les corrections mineures sont autorisées.

–       Candidature au Prix des auteurs pour l’édition savante (PAES)[5] : les presses universitaires canadiennes ont la possibilité de soumettre une demande de subvention fédérale pour financer la publication de livres universitaires par l’intermédiaire de cet organisme. Le processus confidentiel d’évaluation par les pairs est réalisé à la fois par l’éditeur et par le PAES. Dans de nombreux cas (mais absolument pas dans tous les cas), le sort du livre reposera de cette subvention. Votre éditeur vous guidera à travers ce processus. On vous demandera de décrire votre livre, de démontrer en quoi il contribue à ce champ d’études, d’en mentionner les mots clés et de dire quelle proportion de ce travail a déjà été publiée.

iv) Publicité et diffusion

Au moment où votre livre sera prêt à paraître, votre éditeur vous fera parvenir des feuillets publicitaires. Vous l’aiderez à identifier les revues où le livre pourra faire l’objet d’un compte rendu et les professeurs susceptibles de vouloir s’en servir dans leurs cours. Vous participerez également à la rédaction du résumé de votre livre pour le site Internet des presses et à celui de la quatrième de couverture.

Les auteurs ont la possibilité de jouer un grand rôle dans la publicisation de leur livre, s’ils le souhaitent. Demandez à votre éditeur s’il dispose d’un blogue ou d’autres canaux pour y publier une présentation, une tribune libre ou un extrait de votre livre. Votre maison d’édition pourra avoir d’autres possibilités de promotion – telles que l’organisation d’une causerie ou la réservation d’un espace où vous pourrez répondre à des questions lors d’une conférence.

Vous pouvez également faire vous-même votre promotion, mais parlez-en d’abord à votre éditeur, pour vous assurer qu’il est au courant de votre initiative.

6-  Magazines, journaux et éditoriaux

Les magazines, la grande presse et les journaux ont un public différent de celui des revues savantes. Y être publié exige d’écrire de manière vivante et concise. Votre message devra être clair, sans y faire figurer de références (ou très peu) aux publications universitaires. Si vous êtes à la recherche d’un emploi ailleurs que dans le monde universitaire ou que vous cherchiez à travailler dans le secteur des musées, des archives ou des bibliothèques, ou en tant que consultant, ils pourraient présenter plus d’avantages au niveau professionnel que les publications savantes.

Dans ce type de publications, les instructions aux auteurs ne sont pas aussi normées que dans les revues et les presses universitaires. Voici quelques exemples de publications possibles :

i) Les tribunes libres

Les tribunes libres sont des exposés d’opinions sur des sujets d’actualité. Si votre recherche peut contribuer à fournir un contexte à des évènements qui font les gros titres du moment, la tribune libre est un bon moyen de faire connaître vos idées. L’Université McGill dispose d’une liste utile de conseils et de liens[6] à l’intention des chercheurs qui rédigent un article d’opinion pour des journaux canadiens.

Ces différentes publications affichent des instructions pour les propositions d’articles sur leur site Internet. Pour évaluer leur intérêt, vous pouvez envoyer un extrait d’un paragraphe au rédacteur de la rubrique « Opinions » avant de lui soumettre votre article. Mais gardez à l’esprit que le délai de production peut être de moins de vingt-quatre heures. Ce journal voudra diffuser votre article tant que ce sujet est encore d’actualité.

ii) Magazines et journaux

Les journaux et magazines professionnels constituent un bon débouché pour faire connaître des recherches et des projets sur la pratique de l’histoire. Mais là, il est essentiel de savoir raconter une histoire. Il ne s’agit pas d’articles universitaires en réduction. Il s’agit d’articles qui doivent se suffire à eux-mêmes, qui racontent l’histoire de votre travail ou de vos idées d’une façon à la fois vivante et concise.

Les magazines affichent des instructions aux auteurs en ligne pour aider ceux-ci à préparer leur argumentaire. Certaines instructions, comme celles du magazine Canada’s History[7], vous donnent des informations en profondeur sur l’approche privilégiée, la longueur et le format de l’article. La plupart des magazines vous demanderont également de souligner les liens entre votre recherche et le Canada contemporain[8]. Il est important de fournir un contexte historique, mais les rédacteurs du magazine voudront qu’un lien concret avec les évènements actuels accroche leurs lecteurs.

5-  Écriture créative, projets numériques et expositions

Si vous êtes dans un programme d’histoire publique, votre projet final pourrait consister en une exposition en trois dimensions, ou bien en un produit numérique ou créatif qui ne repose pas fortement sur l’écriture. Pour les historiens, les projets créatifs permettent un grand potentiel d’engagement et d’immersion d’un public dans une idée, de raconter des histoires et d’étendre la portée d’une recherche universitaire. De tels projets reposeront probablement sur d’autres formes de promotion – médias sociaux, blogues, bouche-à-oreille ou affiches publicitaires – pour attirer l’attention sur votre travail. Si vous travaillez sur un projet physique, essayez de le documenter avec des photos et des vidéos que vous pourrez faire figurer dans une candidature à un emploi.

Les projets créatifs englobent un vaste éventail de techniques et de technologies mais ne sont peut-être pas aussi soumis à des instructions rigides que d’autres formes de diffusion de votre travail. Le « Centre d’histoire orale et de récits numérisés » de l’Université Concordia[9] dispose d’un bon nombre de ressources pour vous aider à vous lancer dans ce domaine. La section « Rapports, lignes directrices et autres documents » de l’Association des musées canadiens[10] et le site (américain) du National Council on Public History[11] proposent également une masse d’idées et de conseils pour ce type de travail.

Quels que soient les outils que vous utilisez, partager votre travail signifie faire connaître vos idées au-dehors et vous connecter avec votre public. Faire connaître votre travail vous aidera à participer à la conversation savante, à donner forme aux travaux historiques et à atteindre un public plus large. Votre santé mentale et professionnelle doit toujours être votre priorité ; mais en même temps, ne craignez pas de lancer vos pensées et vos idées dans le monde. Vous engager vous permettra de récolter des gratifications inattendues et d’approfondir ce que vous faites en tant qu’historien.

[1] https://s30876.pcdn.co/wp-content/uploads/digital-identity-health-check-for-academics.pdf. 
[2] https://fr.accesscopyright.ca
[3] https://droitdepretpublic.ca/procedure-d-adhesion
[4] http://www.unwrittenhistories.com/a-guide-to-peer-reviewed-journals-in-canadian-history/
[5] https://www.idees-ideas.ca/paes.
[6] https://www.mcgill.ca/newsroom/fr/facstaffresources/op-ed. 
[7] https://www.canadashistory.ca/getmedia/27eeb60c-b502-401d-b59b-a6c8e49e7d6f/EditorialGuidelines.pdf?ext=.pdf.
[8] Voir le magazine Policy Options politiques, et ses instructions aux auteurs : https://policyoptions.irpp.org/fr/soumission-darticles-a-options-politiques/.
[9] http://storytelling.concordia.ca. 
[10] https://www.museums.ca/site/reportsandpublications/reportsguidelinesdocuments.
[11] https://ncph.org/publications-resources/for-practitioners-and-consultants/.